Problèmes d'argent
Par Banque du Canada | Lundi le 1 décembre 2008
Si les gens cherchent à amasser de l’argent, ce n’est pas pour sa valeur intrinsèque, mais plutôt pour pouvoir l’échanger contre les biens et les services qu’ils désirent, que ce soit maintenant ou plus tard. Par conséquent, ils doivent avoir l’assurance que l’objet servant de monnaie est largement accepté par les autres et qu’il conservera son pouvoir d’achat au fil du temps. Bien que l’accumulation de la richesse puisse être avantageuse sur le plan personnel, une quantité excessive d’argent en circulation, par rapport à l’offre de biens et de services, a pour effet de faire grimper les prix : c’est ce qu’on appelle l’inflation. À l’inverse, une masse monétaire insuffisante entraîne une baisse des prix : c’est la déflation. Dans un cas comme dans l’autre, la persistance du problème finit par nuire au fonctionnement efficace de l’économie et peut même provoquer de graves difficultés financières.
Au cours de l’histoire, toutes les civilisations ont connu à maintes reprises des poussées inflationnistes. Au crépuscule de l’Empire romain, pour compenser le coût de leurs excès et des guerres impériales, les empereurs accroissent tour à tour le stock de monnaie en réduisant progressivement la teneur en argent des pièces émises, ce qui ouvre la porte à une inflation galopante et au chaos économique. Au Moyen Âge, les monarques à court d’argent altèrent eux aussi leur monnaie afin de renflouer leurs caisses.
Au XVIIe siècle, l’Espagne et, dans une moindre mesure, le reste de l’Europe sont la proie d’une inflation persistante imputable à l’afflux de métaux précieux provenant d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud. Contrairement aux attentes générales, l’augmentation des réserves d’or et d’argent ne se traduit pas par une prospérité accrue.
Parfois, la monnaie vient à manquer, et les gens font alors preuve d’une fertile ingéniosité. C’est ainsi que la monnaie de papier a d’abord été utilisée par les autorités coloniales de la Nouvelle-France, au XVIIe siècle, pour pallier le manque de pièces métalliques.Il arrive parfois que l’on coupe des pièces pour faire de la petite monnaie. Dans d’autres cas, des substituts font leur apparition. Au XVIIIe et au XIXe siècle, des jetons de cuivre émis par des banquiers et des marchands circulent librement au Canada, tout comme diverses monnaies étrangères et du papier-monnaie émanant de particuliers.
Durant la Grande Dépression, de nombreuses municipalités canadiennes mettent en circulation des billets de faible valeur remboursables contre de la nourriture, du carburant ou un abri, afin d’aider les plus démunis.
De nos jours, des pénuries surviennent encore sporadiquement, lorsque la valeur du métal dépasse la valeur nominale des pièces et que certains retirent celles-ci de la circulation pour les fondre. Si la rareté des pièces présente des inconvénients pour les commerçants et les consommateurs, elle ne constitue généralement pas un problème monétaire grave, et les autorités émettrices y remédient d’ordinaire assez rapidement
L’invention du papier-monnaie donne une nouvelle envergure à l’inflation et aux abus de toutes sortes. Si les billets s’imposent à l’origine, c’est parce que les émetteurs, en l’occurrence des banques privées et l’État, s’engagent à les convertir en or sur demande. Toutefois, cette promesse n’est pas toujours honorée lorsque la situation économique se gâte, et des quantités excessives de pièces et de billets sont alors émises, ce qui cause une hausse généralisée des prix.
Au XIXesiècle, des banques fantômes en Amérique du Nord profitent de la crédulité de certaines personnes et font circuler des billets sans valeur. Ces institutions qui s’établissent loin du lieu où circulent les billets, pour décourager les porteurs de venir en demander le remboursement en or, ont une assise financière précaire, voire inexistante.
L’adoption de monnaies entièrement fiduciaires, au XXe siècle, affranchit l’émission des pièces et des billets de toute contrainte extérieure. Mais en l’absence de contrôles rigoureux, de nombreux pays se retrouvent aux prises avec une hyperinflation – caractérisée par une chute rapide du pouvoir d’achat – et les graves conséquences économiques et sociales qui en découlent. À l’heure actuelle, dans la plupart des pays, le pouvoir d’achat de l’argent est protégé par une banque centrale indépendante instaurée par l’État et qui a pour mandat de réaliser et de maintenir la stabilité des prix.
La contrefaçon à grande échelle et d’autres pratiques frauduleuses peuvent aussi miner la confiance des citoyens dans la monnaie. La falsification des espèces par des particuliers pose depuis toujours des problèmes qui n’ont pas disparu malgré l’imposition de lourdes sanctions. À différentes époques, les pièces d’or ou d’argent ont été rognées, frayées ou trempées dans un bain chimique pour en récupérer de petites quantités de métal. Le papier-monnaie a lui aussi été contrefait, et il continue de l’être, ce qui oblige les banques émettrices à mettre au point des techniques de plus en plus avancées pour déjouer les faussaires et préserver la confiance à l’égard de la monnaie nationale
Cet article représente une partie de la publication nommée Si l'argent m'était conté - La collection nationale de monnaies du Canada de la Banque du Canada
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